MBA

MBA – Le point de vue des employeurs

Côté pile, un employé très motivé par la formation continue qu’il suit, qui découvre de nouveaux horizons, prend confiance en lui, étend son réseau de contacts. Côté face, un salarié fatigué, moins intéressé par son travail, moins disponible aussi, plutôt enclin à faire la leçon à ses collègues. Vu du côté de l’employeur, la médaille MBA comporte deux facettes: si ce projet de formation est mal conçu, si son intérêt n’est pas partagé par l’entreprise, le risque est grand que la collaboration échoue.
«Avoir un MBA n’est pas un handicap», plaisante Jean-Marc Fillistorf, directeur et cofondateur de Jeronimo, leader romand des systèmes d’encaissement par cartes de crédit. Il ne s’agit pas de provocation: si ce trentenaire se déclare assez éloigné des diplômes universitaires prestigieux, «ce monde parallèle», il n’est pas pour autant opposé à la formation postgrade. D’emblée, il n’exclut pas le cofinancement d’un MBA qui lui serait demandé, pour autant que sa société y trouve un intérêt. Mais Jean-Marc Fillistorf fuit tout particulièrement «les jeunes loups aux dents trop longues, qui pensent à eux avant de penser à leur entreprise».

Marketing interne

Du côté des multinationales, le politiquement correct est de rigueur. Aujourd’hui, personne ne peut se permettre de ne pas gérer les talents. On oscille donc entre la «contribution durable au succès de l’entreprise» du Credit Suisse et les «directives maison encourageant le maintien à niveau des compétences et le perfectionnement personnel» de KPMG. Un nouveau terme a d’ailleurs émergé dans le jargon des grandes entreprises, celui de «marketing RH» (ressources humaines). Axel Langer, porte-parole d’UBS, indique qu’«une bonne politique de formation est un investissement, mais également un facteur marketing interne, preuve que l’entreprise accepte d’investir dans son personnel». Dans le contexte de la concurrence pour les meilleurs éléments, le cofinancement d’un MBA peut être une carotte tout aussi valable qu’une augmentation salariale ou une promotion.
Les grandes sociétés possèdent des processus bien rodés pour éviter de se retrouver dans la position de la vache à lait. Il existe un risque de voir l’étudiant quitter aussitôt l’entreprise, une fois son diplôme en poche. Pour éviter ce piège, des contrats spécifiques définissent le montant du soutien de l’entreprise, d’un côté, et l’engagement de l’employé de l’autre. Autant de formalités que Thierry de Preux, vice-président de Korn Ferry International, considère – avec beaucoup de scepticisme – comme «des sources de conflits chroniques menant à des échecs permanents». Ce chasseur de têtes insiste en indiquant apprécier «le MBA qui s’est décarcassé, qui a dû bosser, qui a bougé», et dédramatise au passage les questions d’argent en jugeant qu’un «gars pas trop fonctionnarisé se débrouillera pour trouver des financements». Que ce soit dans les PME ou les grandes entreprises, le plus important restera en effet toujours la personne, son intelligence et son parcours. «Nous embauchons des êtres humains, pas des diplômes», note Thierry de Preux.